dimanche 24 juillet 2011

L'écoute Active


ÉCOUTER POUR MIEUX COMMUNIQUER 
Si vous êtes souvent aux prises avec des problèmes de communication dans vos relations avec les autres, peut-être est-ce dû tout simplement au fait que vous ne savez pas comment réagir face à ce que les gens expriment. Si vos difficultés sont persistantes et ont tendance à s'intensifier, vous pourriez gagner à     pratiquer l'écoute active. Vos relations pourraient en être transformées de façon bénéfique. 

Art de vivre 

Une approche différente 

L'écoute active est un outil précieux pour établir un lien de confiance avec les autres en leur offrant une oreille attentive. Utilisée par les thérapeutes en relation d'aide, ainsi que par de nombreux psychologues, cette approche, développée par le célèbre psychothérapeute américain Carl Rogers, peut également s'appliquer dans notre vie quotidienne. 

Définie par l'organisme Tel Aide comme "une capacité à nous engager avec quelqu'un dans un processus de communication", elle a pour but de faciliter l'expression, la compréhension et l'autonomie de celui que nous écoutons. Le but de cette démarche est donc de permettre à la personne qui s'exprime de se sentir acceptée et comprise, par le biais de I"'empathie", c'est-à-dire par la capacité à nous mettre dans la situation d'autrui, à imaginer ce qu'il ressent. Grâce à l'empathie, il est possible de favoriser chez l'autre une meilleure compréhension de ses émotions
Notre compréhension empathique s'exprime par le biais de la reformulation. En voici un exemple: Imaginons que quelqu'un vous dise: "Je m'en veux aujourd'hui. J'ai crié toute la journée. Je n'arrive pas à payer tout ce que je dois. Je travaille, j'élève seule mes trois enfants. Je suis vidée et je sens que je vais craquer." Vous pourriez lui répondre de façon banale: "Ah! les hommes! Ils ont donc le don de nous abandonner avec toutes les responsabilités. Faudrait passer une loi." 

En revanche, si vous avez réellement le désir de saisir ce que cette personne vit, vous lui direz plutôt que vous comprenez qu'elle se sente dépassée de devoir assumer seule toutes les responsabilités familiales. II est donc très important dans un premier temps de savoir décoder le sens du message. II s'agit alors d'en donner une sorte "d'accusé de réception" pour vérifier si l'on a bien compris ce qu'on voulait nous dire, en renvoyant uniquement ce que l'on croit avoir compris, ni plus ni moins.

II suffisait d'y penser, direz-vous... Mais en fait, ce n'est pas si simple, car si vous avez bien reformulé, donc capté le message, l'autre devrait se sentir compris, ce qui va développer sa confiance, et c'est alors la porte ouverte à l'échange. Mais attention, ce que vous lui communiquez doit correspondre exactement à ce que vous ressentez et pensez, sinon, votre reformulation risque de sonner faux. Dans ce genre de relation, l'authenticité est aussi indispensable que la chaleur humaine. En favorisant l'expression et la libération de sentiments parfois difficiles à exprimer, l'écoute active peut apporter un grand soulagement émotionnel à la personne qui se trouve en face de vous. Elle aide les gens à apprivoiser ce qu'ils ressentent, et à se confier, en étant conscients qu'ils ne seront en aucun cas jugés, qu'il s'agisse d'eux ou de leurs sentiments. Par contrecoup, elle peut faciliter la résolution de problèmes, puisqu'elle aide à réfléchir à voix haute sur une difficulté, celui qui écoute jouant ici, en quelque sorte, le rôle de "caisse de résonance". 

Évidemment, il ne s'agit pas d'écouter sans sourciller un individu de passage qui vous raconterait comment il a expédié dans l'autre monde quelqu'un qui le dérangeait... Outre que cela n'arrive pas tous les jours (heureusement!), il faut, bien évidemment, que vous ayez envie d'écouter cette personne plutôt qu'une autre, que vous ayez de la sympathie pour elle au fond de vous, et un désir sincère de lui venir en aide, sans toutefois faire étalage de votre bonne volonté ni de vos sentiments, en vous oubliant un peu et en vous rappelant qu'il faut du temps et bien des gestes pour amorcer une relation. 

Moi et les autres


Même si cela peut paraître étonnant, puisque cela semble être une démarche tournée avant tout vers les autres, il est bon de pratiquer d'abord l'écoute active sur soi. Les personnes qui ont des problèmes relationnels éprouvent souvent, à la base, des difficultés sur le plan personnel. II est donc indispensable d'identifier les sources de nos frustrations, s'il y a lieu, et de nos émotions; c'est un travail de longue haleine, mais il ne peut être que profitable puisque, en étant à l'écoute et pleinement conscientes de ce que nous sentons, nous sommes forcément plus ouvertes aux autres. 

Par conséquent, il nous sera plus facile d'être attentives à notre interlocuteur. Lorsque l'on souhaite acquérir une écoute pleinement active, il faut d'abord et avant tout savoir taire son propre discours pour concentrer toute son attention sur celui de l'autre. Pour cela, il est conseillé de prendre également en compte ses silences, qui permettent de suivre son rythme et lui laissent le temps d'analyser ses émotions. En revanche, il faut bannir l'usage exagéré du questionnement, surtout s'il porte sur des faits. En effet, outre que c'est indiscret, la personne qui s'exprime pourrait facilement avoir tendance à croire qu'il suffit d'exposer les faits pour obtenir du coup un "diagnostic" assorti d'une "ordonnance psychologique". 

II paraît donc important de lui donner l'initiative de sa démarche pour faire en sorte d'éviter que ne s'installe une démarche passive. Évitez également de commencer vos reformulations par des tics de langage tels que "si je comprends bien", à moins que vous ne vous sentiez l'âme d'une apprentie thérapeute, attitude qui pourrait facilement se tourner contre vous. En effet, il y a de fortes chances que la personne en soit - et à juste titre - exaspérée, et que vous perdiez votre crédibilité.
Par ailleurs, dans le cas où le message de l'autre éveillerait en vous des souvenirs chargés d'émotion, aussi curieux que cela puisse paraître à dire, méfiez-vous de la sympathie. Eh oui! le but n'est pas de ressentir des sentiments analogues à ceux de l'autre. Tout au plus, votre expérience dans le domaine où la personne vous entraîne peut vous servir à prendre du recul pour mieux l'écouter, à moins que vous n'ayez envie de pleurer en chœur avec un compagnon d'infortune. Il ne s'agit pas de réveiller de vieux chagrins aux consonances familières ; sachez plutôt mettre de côté émotions et préjugés pour vous concentrer sur le discours de l'autre, ce qui peut être plus constructif pour les deux. Dans le même ordre d'idée, il vaut mieux oublier les réflexes qui consistent à juger ou à évaluer votre interlocuteur, ce genre d'écoute n'impliquant, par définition, ni accord ni désaccord avec les perceptions de l'autre. Même si vous réagissez positivement, vous devez rester vigilante ; la manifestation de votre approbation risque en effet de nuire à la relation que vous cherchez à établir. 

D'autre part, faut-il rappeler qu'il vaut mieux éviter d'essayer de " régler le problèmes " de l'autre, qui pourrait alors croire que vous ne le jugez pas apte à s'occuper seul de ses difficultés ? On a toujours tendance à croire que la solution est au bout de quelques bonnes paroles, mais cette attitude n'est bien souvent qu'une façon plus ou moins élégante de se débarrasser des autres, ou une preuve de manque d'imagination. Si vous conseillez à une femme qui vient d'être quittée par son conjoint d'oublier tout ça et de s'amuser une bonne fois, il y a de fortes chances qu'elle se ferme comme une huître. À situation égale, ce qui vaut pour vous ne vaut peut-être pas pour l'autre. Posez-vous la question, ne seriez-vous pas la première à vous offusquer d'une telle recommandation? 

Une clé pour les relations intimes 

Dans la vie quotidienne d'un couple, l'écoute active peut être d'un grand secours pour faire face à des situations que nos réflexes systématiques peuvent transformer à la longue en motifs de tension. Prenons un exemple simple: il est 20 heures, et pour la énième fois, vous arrivez tard du travail, où vous avez été retenue. Votre conjoint ne se prive pas de vous le faire remarquer sur un ton de reproche.

Deux choix se présentent alors à vous (avant, bien sûr, de laisser monter la colère que le terrain de la fatigue prépare insidieusement): lui expliquer la situation de long en large en vous perdant dans des justifications (pendant qu'il attend le moindre faux pas de votre part pour amorcer une bonne vieille dispute) ou, plus judicieusement, lui faire entendre que vous savez qu'il est en colère parce que vous arrivez encore une fois en retard. Le fait de signifier à votre conjoint que vous avez bien reçu son message désamorce déjà sa colère et le prédispose à écouter ce que vous avez à lui dire. En couple, peut-être plus que dans n'importe quelle autre relation, il est impératif d'apprendre à se parler sans s'emporter. Lorsque certains couples n'y parviennent pas, ils peuvent aller jusqu'à consulter un thérapeute conjugal pour leur servir momentanément d'intermédiaire et faciliter leurs échanges.

L'écoute active peut favoriser un approfondissement des sentiments existant entre deux conjoints. Elle peut leur permettre de vérifier la perception de leurs propos mutuels, en évitant l'exercice périlleux qui consiste à tenter de deviner ce que l'autre pense sans qu'il l'ait formulé.

Une affaire de gros bon sens? Pas seulement, car si la pratique de l'écoute active peut favoriser un rapprochement des partenaires, elle peut tout aussi bien faire ressortir au grand jour des incompatibilités déjà flagrantes. L'écoute active ne "sauve pas les couples". En revanche, il semble qu'elle soit un élément essentiel à leur bon fonctionnement. II faut que la personne arrive à comprendre le cheminement de son conjoint. Pour cela, les partenaires doivent nécessairement avoir la volonté d'évoluer ensemble. Le désir de partager est indispensable à la réussite de l'union. Dans ce domaine, la bonne volonté et le désir de comprendre l'autre ne sont-ils pas déjà des facteurs essentiels pour la consolidation d'une union? 

En ce qui concerne l'amitié, on n'est évidemment pas face aux mêmes sentiments ni aux mêmes enjeux. Mais une relation amicale est cependant sujette à des évolutions, elle peut passer par des hauts et des bas et par plusieurs phases. À certains moments de votre existence, vous avez peut-être connu ce sentiment, où, rien qu'à imaginer la tête qu'aurait pu faire votre grande amie si vous lui aviez avoué votre insatisfaction dans la relation que vous viviez avec elle, la crainte vous a arrêtée et vous n'avez pas osé aborder la question délicate, préférant grincer des dents et vous inventer des griefs pour mieux pouvoir la détester en secret après chacune de vos rencontres. 

S'il n'est déjà pas facile de dire les choses simplement et au moment opportun, il est d'autant moins aisé d'écouter sans systématiquement porter un jugement, surtout avec une personne que l'on connaît et avec laquelle on se croit autorisée à agir ainsi. II est tellement plus facile de noyer les autres de conseils, de reproches et de recommandations plutôt que de les écouter simplement. On finit par se dire: "Inutile de lui en parler, je sais déjà ce qu'elle va me répondre." Ainsi, bien des amitiés finissent par s'étouffer ou par n'être plus qu'un beau souvenir, faute d'attention mutuelle et de respect.

Avec ou sans thérapie 

Le cheminement thérapeutique peut constituer une solution pour améliorer notre écoute active, mais surtout, pour aller plus avant dans la résolution de problèmes ou de conflits. En respectant simplement les règles de base de cette approche, on peut parvenir à améliorer la qualité des échanges avec ses proches. Tout dépend de nos besoins : à certains moments de notre vie, nous pouvons simplement avoir besoin de sentir que nous comptons pour quelqu'un, et le fait d'être écoutée pendant quelques minutes nous rassure alors. Si ce besoin persiste ou si la personne sent qu'elle a besoin d'approfondir ses émotions, il lui sera peut-être préférable de consulter un thérapeute ou un psychologue. 

Nous avons tous et toutes besoin d'être écoutés à différents moments de notre existence. Dans ces moments-là, il n'y a rien de plus désagréable que l'impression de parler dans le vide ou d'être incomprise. Même si on s'exprime de manière confuse, on aime se faire entendre, et l'écoute active peut s'appliquer à différentes situations de notre vie. Elle peut s'exercer avec ou sans l'aide d'un thérapeute, car c'est une approche pleine de ressources, basée sur des qualités humaines.
En effet, dans l'accueil des propos, il faut déployer de la douceur et de la patience à parts égales. Cela implique de notre part une attitude de respect et d'acceptation de l'autre. Lorsque nous faisons de la bonne écoute active, nous sommes amenées à écouter beaucoup plus que nous ne parlons, et nos paroles devraient aider l'autre à formuler plus clairement ce qu'il essaie d'exprimer: Encore une fois, il ne faut pas hésiter à reformuler ce qu'il nous communique, et l'encourager à parler de lui-même: cela lui permet de garder présente à l'esprit la situation actuelle. Outre qu'elle peut soulager quelqu'un d'une émotion trouble, l'écoute active peut ouvrir au monde, dans ce sens qu'elle permet de comprendre ce que les autres peuvent vivre, sans les juger. C'est une belle expérience sur le plan humain et c'est très enrichissant sur le plan personnel. Elle nécessite beaucoup de patience, de persévérance et d'ouverture d'esprit, mais en revanche, elle permet de beaucoup recevoir en retour!


RESSOURCES 

• Le développement de la personne, Carl Rogers, Éditions Dunod, 1967. 

• Communication et épanouissement personnel, Lucien Auger, Les Éditions de l'Homme, 1972. 

• La relation d'aide, Jean-Luc Hétu, Les Éditions du Méridien, 1986. 

• Organisme Tel-Aide: (514) 935-1101.

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